Ce n’est pas la première fois que des élus et des citoyens s’interrogent sur la possibilité de transformer le poste de maire de la Ville de Hearst à temps plein. Ce sujet est ressorti à plusieurs reprises au cours de la dernière année, surtout parce qu’il y avait une campagne électorale municipale. Un argument semble faire l’unanimité, pour attirer les meilleurs candidats, un poste à temps plein faciliterait les choses.
Ce n’est pas seulement à Hearst qu’on se questionne sur la possibilité d’offrir un poste à temps plein aux premiers magistrats. Encore une fois lors des élections municipales 2022, le nombre de maires élus par acclamation a augmenté, faute de candidats.
Actuellement, le poste de maire de la Ville de Hearst est à temps partiel et rémunéré à la hauteur de 24 432 $ plus les bénéfices qui s’élevaient à 6 579,77 $ en 2021. À ce montant s’ajoutent les indemnités quotidiennes et le remboursement des voyages.
En Ontario, il n’existe pas d’échelle salariale déterminant la rémunération des élus municipaux. Les montants alloués diffèrent d’une municipalité à l’autre. Dans les 444 municipalités en province, les écarts peuvent être énormes.
Localement, le conseil en avait discuté avant l’arrivée de la pandémie, mais le sujet a rapidement été placé sur la tablette. Conrad Morin, qui était conseiller municipal à cette époque, se souvient de certaines discussions. « Il y a une couple d’années, je pense lors de mon troisième mandant, on avait travaillé pour essayer d’avoir un maire à temps plein et j’étais entièrement d’accord avec ça. Parce qu’on s’entend depuis que Roger est à la retraite, il est presque maire à temps plein, mais il n’a pas le salaire », indique celui qui a passé plus de onze années à titre de conseiller.
Selon les données de l’Association des directeurs, greffiers et trésoriers municipaux de l’Ontario (AMCTO) recueillies en 2018, seulement 14 % des postes de maire ontarien étaient à temps plein. On remarque également qu’un maire sur deux est à temps partiel dans les municipalités de 50 000 à 99 999 habitants. À peine 2 % des postes de maire sont à temps plein dans les municipalités de 5 000 à 25 000 citoyens.
Des données ont également été calculées par région. Comme on peut le constater sur le tableau suivant, le salaire du premier magistrat de la Ville de Hearst, soit 24 432 $, est plus près de la moyenne des maires payés à salaire pour les municipalités de 5000 à 9999 citoyens. Mais, il est important de noter que la Ville de Hearst comptait 5070 habitants lors du recensement de 2016, passant sous la barre des 5000 personnes lors du recensement de 2021, à 4794 citoyens.
Dans plusieurs villes, le poste de maire est très peu rémunéré. Toujours selon les chiffres de l’AMCTO, 47 % des maires ont des salaires entre 20 000 $ et 40 000 $, 18 % de ceux-ci obtiennent moins de 20 000 $, 12 % se retrouvent entre 60 000 $ et 80 000 $ et 7 % sont payés plus de 100 000 $ par année.
Les analystes politiques constatent que la grande majorité des élus à la tête des municipalités offrant des postes à temps partiel sont déjà à l’aise financièrement, sont à la préretraite ou occupent un emploi avec beaucoup de latitude, comme des propriétaires d’entreprise. Pour combiner un emploi à temps plein avec un poste de maire, la personne en question a besoin d’avoir beaucoup d’énergie et être en mesure de se lever tôt et se coucher tard. Et, laisser un bon emploi pour le poste de maire entraine souvent une baisse de salaire, ce qui décourage possiblement les meilleurs candidats.
La situation géographique
Un autre argument de poids pour un poste de maire à temps plein à Hearst est la distance avec les pôles décisionnels. « Être maire, ce n’est pas juste gérer le conseil municipal. Il faut que tu sois présent devant les politiciens provinciaux et fédéraux lors des rencontres, et on est à 12 heures de Toronto et d’Ottawa », explique Conrad Morin. « Il y a des rencontres partout, Timmins, North Bay, Sudbury… Sérieusement, comment Roger faisait avant de prendre sa retraite, je ne le sais pas et j’ai beaucoup de respect pour ça, et je pense que la communauté l’apprécie également. »
Le budget est au coeur de cette décision. Est-ce que la Ville de Hearst a les moyens financiers de s’offrir un maire à temps plein sans augmenter le compte de taxes des contribuables de manière significative ?
Certaines options pourraient être étudiées pour sauver des couts. Premièrement, la Ville pourrait passer le nombre de conseillers de six à quatre, ce qui représente une économie minimum de 22 156 $. Plusieurs municipalités de 4000 à 6000 habitants n’ont que quatre échevins, dont la Ville de Cochrane. En Ontario, 42,8 % des municipalités comptent cinq membres sur leur conseil municipal et 30,74 % en ont sept.
Dans certaines occasions, le maire peut également accomplir d’autres tâches. Toutefois, il faut être prudent puisque le rôle d’un maire n’est pas de toucher à l’administration du personnel de la Ville ni de s’ingérer dans les affaires courantes de l’administration. Des missions en développement économique peuvent être effectuées, ou encore assumer des rôles dans les représentations d’affaires.
Depuis que Roger Sigouin est maire de la Ville de Hearst, la qualité de ses adversaires lors des élections n’était pas assez attirante pour les électeurs puisqu’il a toujours remporté ses élections de manière convaincante. Est-il indélogeable pour sa qualité de maire, ce qui décourageait les autres candidats potentiels à se présenter, ou la charge de travail versus le salaire offert n’en valait pas la peine ?
La prochaine élection pourrait peut-être répondre à cette question puisque Roger Sigouin a confirmé qu’il s’agissait de son dernier mandat. « Je suis entièrement d’accord qu’avec un poste de maire à temps plein, on aurait des candidats avec beaucoup plus d’énergie. Parce qu’actuellement, ce n’est pas évident de devenir maire à temps partiel si tu as un travail », conclut M. Morin.
