L’histoire de cette œuvre est celle de plusieurs couples, de plusieurs familles. Cette pièce parle d’un sujet important d’actualité et questionne notre société sur la population vieillissante; à savoir où et comment on s’occupe d’eux. Si les partenaires d’un couple ne nécessitent pas les mêmes soins, ils sont souvent séparés.
Le Théâtre français de Toronto (TfT) a besoin du soutien de ses spectateurs et vient de lancer sa campagne annuelle de soutien sur le thème Lumière ! La collecte de fonds, au nom évoquant l’espoir, fait appel à la générosité de ses abonnées, qui ont jusqu’au 31 décembre pour y participer.
« On espère que nos fidèles reprennent les bonnes habitudes, on fait tout dans ce sens », explique la responsable de la campagne, Maxime Kottmann.
Une fréquentation encore timide
Depuis la réouverture post-pandémie, les salles ne se remplissent qu’à moitié, pour les spectacles dédiés au grand public. Les habitués sont encore hésitants à occuper des espaces clos.
Pour Maxime Kottmann, « il suffirait que les gens passent la porte du théâtre et en parlent ! »
Le jeune public ne se fait pas prier. Perruche a fait salle comble, récemment, au théâtre Spadina de l’Alliance française.
Quant aux Contes du voyageur, le spectacle itinérant pour les 6-8 ans, il parcourt la province jusque dans les régions les plus éloignées. Il rayonne et contribue à la promotion des arts vivants en français, auprès des petits francophones.
Favoriser la production
L’infolettre du TfT est envoyée tous les mardis à 5000 personnes. C’est tout autant de visites du site internet par mois. Toutefois, cela reste insuffisant pour rehausser le taux de fréquentation du théâtre.
La communication à grande échelle, comme les bannières publicitaires sur internet, impliquerait une révision budgétaire au détriment de la création. « C’est très efficace, mais c’est un budget qui sacrifierait la production artistique du Théâtre », explique Maxime Kottmann.
Succès du TfT en milieu scolaire
Le public adolescent reste fidèle aux Zinspirés.Ce concept très populaire offre aux auteurs en herbe la chance d’écrire une pièce avec le soutien d’auteurs confirmés. Un véritable tremplin pour les férus du théâtre.
Chaque année depuis 10 ans, une sélection de pièces sont retenues pour être jouées par des comédiens du théâtre. Les pièces comptent une vingtaine de représentations, toutes plébiscitées par les spectateurs.
Des partenaires fidèles
Les fonds du Conseil des Arts de l’Ontario ont permis de miser sur la médiation culturelle. Elle a renforcé la communication du TfT auprès de ses partenaires existants.
C’est une stratégie de communication payante auprès des conseils scolaires francophones, puisque les programmes jeunesse du TfT sont toujours très demandés. À ce jour, plus de 10 000 jeunes et enseignants ont participé aux Zinspiré.e.s.
« Nos chargés de médiation culturelle n’hésitent pas à aller à la rencontre des enseignants à l’heure du dîner », explique Maxime Kottmann.
Le théâtre à l’assaut des francos
Le TfT se rapproche davantage des francophones en participant à tous les évènements qui les réunissent, comme le Bastille Day des Français de Toronto.
Le Centre francophone du Grand Toronto, le Club canadien, les deux conseils scolaires francophones MonAvenir et Viamonde, l’Université de l’Ontario français, pour ne citer que ceux-là, soutiennent le théâtre en relayant ses informations auprès du public ou en invitant le TfT à participer à certaines de leurs activités.
« Au détour de ces évènements, nous rencontrons d’anciens partenaires et nous nous en faisons de nouveaux », rapporte Maxime Kottmann.
Une programmation éclectique
L’intention de la nouvelle directrice artistique du TfT est claire : toucher le coeur de tous les francophones et francophiles.
Karine Ricard propose un programme au contact direct du public avec divers genres, formats, thèmes et histoires pour n’oublier aucun Ontarien. La programmation 2022-23 (de septembre à juin) affiche 9 spectacles grand public et 4 productions jeunesse sont à voir, au théâtre de la rue Berkeley et à l’AFT.
Des tarifs attractifs
Pour conquérir les curieux et motiver les frileux, le TfT propose des tarifs préférentiels avec des places de 10 à 20 $. Maxime Kottmann rappelle aussi le concept payez-ce-que-vous-voulez certains soirs. Ces billets sont disponibles en ligne le matin même des représentations.
Retour du gala-bénéfice du TfT
Le TfT relancera son gala-bénéfice au printemps prochain. Le 11 mai 2023, les amis du théâtre auront droit à une formule spectacle et buffet sur un thème champêtre.
En effet, la comédie musicale franco-ontarienne Vache, the Musical fera l’ouverture de la soirée au 26 rue Berkeley, à Toronto. Le dîner se poursuivra à l’école Enoch Turner, voisine du théâtre.
Maxime Kottmann promet une tablée qui met en valeur les produits du terroir ontarien. Le TfT attend 150 invités, qui courront la chance de gagner des lots qui seront mis en jeu. Les billets seront offerts à des prix abordables pour les 18-30 ans, promet-elle.
Ce sera une autre manière ludique et conviviale de supporter l’un des piliers torontois du divertissement et de l’éducation en français.
Théâtre Action a été essentiel à l’expansion du théâtre en français en Ontario. Il ne l’a pas créé, mais il lui a permis d’être reconnu, d’obtenir du financement, de se distinguer et de se perpétuer. Atteindre 50 ans est d’autant plus impressionnant pour un organisme « caméléon », qui a réussi à se réinventer plusieurs fois.
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Julien Cayouette – IJL – Réseau.Presse – Le Voyageur
Théâtre Action a été essentiel à l’expansion du théâtre en français en Ontario. Il ne l’a pas créé, mais il lui a permis d’être reconnu, d’obtenir du financement, de se distinguer et de se perpétuer. Atteindre 50 ans est d’autant plus impressionnant pour un organisme « caméléon », qui a réussi à se réinventer plusieurs fois.
Il y avait du théâtre en français en Ontario avant 1972. Il était animé par des troupes amateurs, bénévoles et étudiantes qui travaillaient en silos, sans échanger. Dans cette forme, il ne pouvait pas évoluer.
Plusieurs actions décisives sont à l’origine de la création de Théâtre Action (TA). Plus particulièrement une réunion de l’organisme Theatre Ontario à l’été 1971 où « huit participants de langue française, ayant pris conscience de leur communauté d’intérêts, [ont] refusé de s’intégrer aux ateliers de langue anglaise », peut-on lire dans l’album des 35 premières années de Théâtre Action, écrit par Joël Beddows et Amelie Mercier.
Ce qu’avance le premier « French officer » du Conseil des Arts de l’Ontario (CAO), Richard Casavant, c’est que ces huit participants (Richard Casavant, Jeanne Sabourin, Pierre Bélanger, Luc Clouâtre, Denis Courville, Jacqueline Martin, Sr. Micheline Poirier et Nicole Tessier) ont formé leur propre groupe à sa suggestion.
Au début de la conférence, chacun des huit était à une table différente avec un groupe d’anglophones. « À la pause, j’ai dit à Jeanne : “ On va faire ça autrement. Réunis les francophones, on va se réunir dehors parce que je veux savoir quelles sont leurs réalités et s’il y a lieu de continuer cette réunion, cette conférence dispersés comme nous le sommes “ », raconte M. Casavant. Ainsi est né le Groupe Arc-en-ciel.
Casavant avait baigné dans le milieu théâtral, ayant participé aux activités d’un petit théâtre d’été dans les années 1960. Il a quitté la pratique pour entrer au CAO, mais l’un de ses objectifs a toujours été de faire avancer le théâtre franco-ontarien, de l’aider à se distinguer des pièces classiques et québécoises.
Mais lors de cette réunion, M. Casavant se devait de rester discret, de ne pas trop montrer ses cartes ou d’avoir l’air de revendiquer, puisqu’il était un observateur du gouvernement. «Les actions que je vais faire doivent être assez discrètes. Mais mon but à moi, c’est d’avoir une association, éventuellement, qui va offrir des services d’animation» et de communication entre les théâtres. Un organisme qui rencontrerait les critères de financements du CAO.
À ce moment-là, très peu de compagnies de théâtre franco-ontariennes se qualifiaient pour des subventions. Or, comme agent du CAO, c’était la meilleure façon pour M. Casavant d’arriver à ses fins.
Il dit s’être battu pour obtenir des fonds et demander à Pierre Beaulne de produire un rapport. Ce rapport a souligné le retard des troupes de théâtre francophone par rapport aux anglophones et la « nécessité de créer un organisme de développement en vue de stimuler une activité théâtrale de langue française », écrivent Beddows et Mercier.
Une action dans la mouvance
En entrevue, Joël Beddows rappelle que Théâtre Action est né dans « un grand mouvement interventionniste sur le plan culturel et identitaire ». Il y avait eu le Rapport Saint-Denis, à la fin des années 1960, qui niait l’existence d’une culture franco-ontarienne distincte et avançait que les francophones de l’Ontario ne pourraient jamais s’émanciper du Québec.
Les actions et les rapports suivants ont activement contredit cette prémisse. Surtout face au repli des francophones du Québec sur eux-mêmes.
« Théâtre Action est devenu le lieu qui proposait les activités, de ce qu’on dirait aujourd’hui, de médiation-culturelle, qui faisait en sorte que cette idée de mettre au monde une identité et une culture pour l’accompagner, trouverait preneur permis la population générale. Ce qui est également important je dirais, c’est que dès le départ, Théâtre Action a adopté le principe de la décentralisation », argumente M. Beddows. Cette décentralisation était importante selon lui en raison de la répartition de la population francophone.
Ce mouvement identitaire du début des années 1970, rappelle Joël Beddows, est « contreculturel, contestataire, ça se positionne dans les actions contre une conception traditionnelle conservatrice religieuse de la culture canadienne-française, aussi contre le bilinguisme institutionnel ». TA ne s’identifie pas directement avec ces valeurs, mais baigne dans cette atmosphère et est parfois menée par des gens qui y adhèrent.
« C’était un projet étrangement bien réfléchi pour une gang de jeunes. Étrangement bien articulé pour des gens à peine formés » en théâtre, ajoute M. Beddows.
Richard Casavant considère également que les Éditions Prise de parole ont eu un grand rôle à jouer dans la création du théâtre franco-ontarien en publiant très tôt les textes de pièces. « Le théâtre, une fois que c’est dit, c’est dit. Ça ne reste pas nécessairement comme quelque chose qui est écrit. Bien heureusement que Prise de parole a publié les textes d’André Paiement dès le début. » Pour lui, théâtre et littérature s’entremêlent et s’entraident.
Naissance à Sudbury ?
La création de Théâtre Action est associée à Sudbury. La décision a effectivement été prise à l’Université de Sudbury au début mai 1972, lors d’un forum provincial organisé par le Groupe Arc-en-ciel.
« Théâtre Action regroupait, pour la première fois dans l’histoire du théâtre franco-ontarien, tous les gens qui s’occupaient directement ou indirectement du théâtre dans la province », a écrit Pierre Beaulne dans son rapport sur la rencontre.
Le nom Théâtre Action, dont Richard Casavant réclame la paternité, y a été utilisé pour la première fois. Mais pour lui, TA n’a pas nécessairement été créé à Sudbury. L’idée était née plusieurs mois plus tôt, ailleurs. Les actions pour mener à sa création avaient été faites en consultant plusieurs troupes de partout en province. La promulgation de sa création a eu lieu à Sudbury, quelques mois après la présentation de Moé j’viens du nord, s’tie!, mais aurait très bien pu avoir lieu ailleurs.
En théâtre comme ailleurs, les femmes et leurs créations ont historiquement été moins reconnues et mises en valeur. Pour recueillir de l’information pour écrire La chienne, une pièce de théâtre sur la prise de parole des femmes dans la culture franco-ontarienne, Emmanuelle Gingras a mené une discussion dans le cadre du festival Feuilles vives. Elle demandait : Les enjeux identitaires et linguistiques ont-ils éclipsé la prise de parole des femmes dans le théâtre franco-ontarien ?
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Julien Cayouette – IJL – Réseau.Presse – Le Voyageur
Les trois femmes de théâtre qui ont participé à la réflexion — Brigitte Haentjens, Marie-Thé Miron et Miriam Cusson — sont d’accord que la reconnaissance des autrices et metteuses en scène est un phénomène récent. « Même au Québec, ça fait une dizaine d’années que les créations des femmes sont reconnues », dit Mme Haentjens.
Entre la naissance de la culture franco-ontarienne dans les années 1970 et cette nouvelle reconnaissance, elles n’ont tout de même pas été absentes du milieu. Mais elles étaient plus souvent reléguées à des rôles de coordination, d’administration et de développement communautaire. Des aspects qui ont tout de même été essentiels au développement du théâtre franco-ontarien, insiste Miriam Cusson.
Si elles étaient visibles dans la création, c’était surtout dans des œuvres collectives, note Marie-Thé Morin. Elle déplore que plusieurs textes de pièces de théâtre écrites par des femmes n’aient jamais été montés.
Dans ces premières années, les femmes étaient déjà occupées à mener plusieurs combats pour leurs droits. Plusieurs groupes de revendication, même de gauche, raconte Brigitte Haentjens, étaient très machos.
Le problème n’était peut-être pas qu’un enjeu était plus important que l’autre, mais que les hommes ne laissaient pas de place aux femmes dans ces discours.
Sans compter que « les tabous étaient partout» dans les années 1970 et 1980, lance Brigitte Haentjens. « Si on sortait du cadre de sauvegarde de la langue et de la foi, on se faisait critiquer. »
Marie-Thé Morin croit que ce climat social faisait en sorte que les femmes se sentaient moins autorisées à écrire.
Peut-être un signe d’évolution, Miriam Cusson affirme qu’elle a toujours senti qu’elle avait la permission d’écrire. Elle a par contre ressenti une responsabilité de parler de la réalité des femmes, trop souvent éclipsée par d’autres sujets.
La situation est plus reluisante aujourd’hui. Par exemple, des neuf mises en lectures, laboratoires et table ronde présentés à Feuilles vives 2022, six étaient des projets menés par des femmes.
Mais les droits de femmes ne sont jamais totalement acquis, rappelle Brigitte Haentjens, alors il ne faut pas baisser les bras.
Surtout que l’illusion que le combat est gagné est bien présente. L’ancien directeur artistique du Théâtre français de Toronto, Joël Beddows, a souligné qu’il était parvenu à présenter une saison où 50 % des pièces présentées avaient été mises en scène par des femmes il y a quelques années. Mais quand il a tenté de souligner ce fait auprès d’un journaliste, sa réaction avait été faible, comme si c’était déjà normal.
Alexandra Snider – IJL – Réseau.Presse – Le Goût de vivre
Le 23 juin, une pièce de théâtre a été présentée au théâtre King’s Wharf, pour la première fois depuis la fin 2019. Steven Karcher, directeur général de Drayton Entertainment, la compagnie de divertissement provinciale qui exploite le King’s Wharf, explique que « l’enthousiasme est palpable. On a ressenti de l’isolement pendant la pandémie et on a maintenant l’occasion de créer quelque chose de communautaire. »
De son côté, Arkady Spivak, producteur et PDG du Talk is Free Theatre à Barrie, signale que de nombreuses compagnies ont trouvé leur second souffle, car « pour la première fois on a dû se battre pour l’existence du théâtre. On a dû le manquer et on rêvait à son retour. »
Repenser la diffusion des spectacles
Pendant la pandémie, de nombreux théâtres ont dû adapter la méthode de diffusion de leurs spectacles. Le King’s Wharf a dû offrir des spectacles de façon uniquement virtuelle. « On a voulu établir un moyen de rester engagé avec la communauté, dit Steven Karcher. Donc, on a créé du contenu virtuel, tel que des spectacles de variétés et des concerts en direct. » Malgré le succès de certaines initiatives, notamment un tirage virtuel, Steven Karcher croit toujours que « l’expérience partagée est une partie essentielle du théâtre. »
Quant au Talk is Free Theatre, Arkady Spivak note que la compagnie est unique, car elle ne possède pas un théâtre et elle ne se limite pas à un seul type de spectacle. « Notre structure organisationnelle nous permet de prendre des risques artistiques, donc lorsqu’on se retrouve dans une situation précaire, telle que la pandémie, c’est complètement naturel pour nous. » La compagnie a donc offert des programmes et la lecture d’œuvres de façon virtuelle. En plus, elle a présenté des spectacles dans des lieux extérieurs comme des parcs, des forêts et des cours arrière ainsi que dans des théâtres locaux après l’assouplissement des restrictions.
Photo : Roman Boldyrev
Prioriser les besoins des acteurs
Selon Steven Karcher, les effets négatifs sur la santé mentale représentent une conséquence importante de la pandémie, notamment pour les acteurs qui ont vu leur source principale de revenu disparaître du jour au lendemain. Arkady Spivak souligne que le bien être est un facteur essentiel à considérer dans le domaine théâtral, une conviction qui s’est raffermie pendant la pandémie.
Photo : Gracieuseté de Drayton Entertainment
« Je crois que maintenant on reconnaît davantage les besoins personnels des acteurs et qu’on tente plus d’y répondre », maintient M. Spivak . « Avant c’était le spectacle doit continuer à tout prix, peu importe les maladies ou les situations personnelles. Je crois que présentement des artistes peuvent retrouver une partie de leur dignité humaine. » À l’heure actuelle, les compagnies embauchent des doublures plus fréquemment pour permettre davantage de flexibilité aux acteurs.
La diffusion de spectacles francophones
La Clé, un organisme de services francophones, est un diffuseur de spectacles et de pièces de théâtre francophones dans le comté de Simcoe. En septembre 2021, La Clé a diffusé la pièce de théâtre Jack, du théâtre du Nouvel-Ontario sur un grand écran au parc Rotary Champlain Wendat. De plus, le 30 avril dernier, en raison des mesures assouplies, le spectacle de Stéphane Guertin a pu avoir lieu en présentiel à la Salle Roland Desroches à Penetanguishene.
Selon Julie-Kim Beaudry, coordonnatrice artistique à La Clé, le plus grand défi pendant les dernières années a été de remplir les salles. « On veut rejoindre les gens et on veut assurer leur sécurité. Si les gens ne sortent pas parce qu’ils ne se sentent pas en sécurité, on essaye de les sécuriser. » Donc, les salles de spectacles sont nettoyées à fond, les gens peuvent porter leurs masques et il y a du désinfectant pour les mains. Mme Beaudry prévoit que les spectacles à venir seront « plutôt hybrides que strictement virtuels. Je pense que la plupart des gens sont fatigués du virtuel et que la majorité veut sortir. » Grâce à de l’équipement de tournage récemment obtenu, La Clé pourra davantage diffuser ses spectacles en direct.
Le théâtre sans restrictions
Grâce à la levée des restrictions, le Talk is Free Theatre est en mesure d’offrir son camp d’été pour la première fois depuis 2019. Sa saison théâtrale s’est terminée en juin, mais Arkady Spivak, est heureux d’annoncer que la troupe planifie de nouveaux projets à l’automne, tels que des spectacles sur des toits à Barrie. En plus, les billets pour les spectacles de la programmation régulière sont gratuits jusqu’en 2023, afin d’améliorer l’accès au théâtre pour tous.
Julie-Kim Beaudry souhaite voir plus de francophones donner leur avis sur la programmation et assister aux prochains spectacles. « On veut que les gens nous partagent quels spectacles ils veulent voir, parce qu’on sert la communauté », maintient Mme Beaudry.
Selon Steven Karcher, au King’s Wharf « la récupération depuis la pandémie signifie reconnaître comment les clients se sentent maintenant et offrir des services qui les mettent à l’aise, car il y a une variété de niveaux de confort. » Par conséquent, certains spectacles sont présentés à pleine capacité, d’autres à capacité réduite ou avec l’exigence de fournir une preuve de vaccination à l’entrée. La compagnie offre également une garantie aux détenteurs de billets que s’ils doivent annuler, ils conservent des options telles que se faire rembourser ou recevoir un crédit pour un des spectacles à venir.
Enfin, même si, au théâtre, la pandémie ne joue plus le premier rôle, de toute évidence elle occupe toujours une place sur la scène et dans l’auditoire.
Une artiste locale présente une nouvelle œuvre théâtrale dans ses premières mises au point. Le public est arrivé à la Scierie patrimoniale en début de soirée le 21 mai pour avoir un avant-gout de la pièce intitulée Coincée dans l’immensité, réalisée par le Théâtre Mauve Sapin, une compagnie de théâtre située à Hearst. La mise en scène n’était rien de complexe : deux lutrins au centre de la pièce pour les comédiennes, Émilie Camiré-Pecek et Camille Landry, et une table de bois parsemée d’images historiques desquelles la narratrice et réalisatrice principale de l’œuvre, Kariane Lachance, s’est inspirée pour pondre le projet.
Lors du 5 à 7, les spectateurs ont joué le rôle d’œil extérieur afin de faire part de leurs commentaires à la suite de la mise en lecture. Les multiples réactions et questionnements ont été pris en note en vue de corriger certaines imperfections. « Leurs commentaires étaient extrêmement pertinents parce que ces gens vivent dans le Nord et ont aussi des histoires à nous raconter », élabore Mme Lachance, directrice artistique de Théâtre Mauve Sapin, ajoutant que les participants ont fait des remarques également sur d’autres aspects plus logistiques de l’histoire.
La première fois que Le Nord a couvert la réalisation de la pièce de théâtre, Mme Lachance avait raconté que le projet porterait sur l’histoire de deux franco-phones de deux coins de pays différents. Depuis lors, de nombreux éléments de l’œuvre ont changé, entre autres le genre de l’un des personnages. Simone, une fille du Nord, était initialement un homme à la rencontre de Flora, une fille des Maritimes, mais l’autrice a pensé bon de concevoir un dialogue entre deux personnes du même genre pour créer un rapport de force égal. « Depuis qu’on l’a changé et que c’est rendu deux femmes, je trouve que le rapport est plus clair parce qu’on voit vraiment l’enracinement avec les deux femmes », explique l’autrice.
Elle travaille sur le texte depuis environ un an. Tout récemment, Émilie Camiré-Pecek, originaire de Gatineau, s’est impliquée dans le processus de rédaction pour y ajouter des scènes inspirées de l’histoire locale portant sur le parcours de la femme dans le Nord de l’Ontario, ainsi que pour peaufiner certains passages. Le récit présenté met en valeur les similarités et les particularités du vécu des femmes habitant le Nord de l’Ontario comparativement aux femmes issues des provinces de l’Est. Par exemple, l’une des discussions dans la pièce porte sur le rôle du coffre de cèdre – une trousse d’objets précieux offerte à une femme et servant d’outil lorsqu’elle quitte son premier domicile – dans la vie de Simone.
En écrivant le texte, les deux artistes ont échangé des impressions et des commentaires pour construire une ligne narrative autour de cet emblème. « En parlant, on pouvait partager nos expériences et apporter ça au texte », dit Mme Camiré.
Au cours des prochaines semaines, Kariane Lachance poursuivra son processus de rédaction. De plus, elle planifie effectuer un second laboratoire de la pièce à Sudbury prochainement.
La directrice artistique a aussi annoncé qu’elle sera bientôt à Montréal pour une durée de huit mois, dans le but de suivre une formation d’écriture et de mise en scène à l’École nationale de théâtre du Canada.
Dans une région « défrichée par et pour les hommes », quelle était la place de la femme ? Kariane Lachance, directrice artistique de Théâtre Mauve Sapin (TMS), explore cette thématique à travers sa nouvelle pièce Coincée dans l’immensité : un récit au sujet du parcours de la femme à Hearst depuis le début de la colonisation jusqu’aux temps modernes.
Pour rédiger son texte, Mme Lachance s’est inspirée de la photographie locale. Avant de sortir son stylo, elle a consulté des images du Centre d’archive de la Grande Zone argileuse de Hearst, question de trouver un peu d’inspiration. Sous ses yeux, elle avait un aperçu du vécu des premières femmes ayant habité le territoire, ce qui lui a bien servi lors du processus de création.
Or, la pièce n’est pas un portrait mettant en lumière des personnages réels du Nord de l’Ontario, mais plutôt une histoire inspirée de l’expérience féminine. « Il ne va pas nécessairement y avoir des faits historiques coulés dans le béton dans le texte, mais c’est un matériau d’inspiration », raconte-t-elle.
La représentation de son oeuvre sera tenue à la Scierie patrimo-niale le 21 mai. Le choix du lieu n’est pas aléatoire. Elle veut faire un lien entre le passé forestier de sa ville natale, soit le coeur de l’économie locale, et le quotidien vraisemblable des femmes d’ici.
Mme Lachance dit qu’elle a le sentiment que le Nord de l’Ontario est parfois stéréotypé comme étant un endroit dur, froid et masculin. La relation entre le territoire et la femme est devenue de plus en plus importante en écrivant. L’artiste a inclus la rencontre de deux personnages : une femme des Maritimes, libre comme l’océan, qui arrive dans la région et un homme originaire de la terre qui cherche à s’enraciner. Sur un coup de tête, les deux vont visiter un chalet dans le Nord de l’Ontario, que l’homme a reçu en héritage. À travers l’histoire, on voit une dualité non seulement entre les deux personnages, mais aussi entre ce qui est enraciné et ce qui est libre. « C’est très métaphorique, pour l’instant ! »
Danser en s’inspirant de clichés
Au début, Kariane Lachance utilisait surtout des textes historiques pour réaliser la pièce. Toutefois, puisque son nouveau projet est un mélange de danse et de théâtre, elle s’est éventuellement tournée vers la photographie pour s’inspirer. « Il y a un aspect visuel qui est très important », dit-elle.
Dans le cadre de sa résidence d’écriture, elle a mis trois mois à écrire des textes qui ont servi de repère pour la choréographie. En vue d’accompagner la pièce, il y aura aussi des environnements sonores adaptés aux textes et aux danses.
L’artiste explique que le public ne verra pas le produit final lors du grand jour, mais bien une « étape de recherche », lui permettant d’avoir un oeil extérieur pour améliorer sa création. « On se donne la permission de ne pas savoir ce que ça va donner », admet-elle.
Elle mentionne que les gens de tout âge sont bienvenus, mais que le projet s’adresse à un public adulte. Elle s’attend à accueillir un petit groupe, soit une trentaine de personnes, pour créer une ambiance plus intime.
FRANCOPRESSE – Il y a cinq ans, Anaïs Pellin a quitté sa Belgique natale pour s’installer à Vancouver, en Colombie-Britannique. La comédienne, autrice et metteuse en scène pensait alors sacrifier sa carrière théâtrale; elle a, au contraire, connu de beaux succès depuis son arrivée, allant même jusqu’à fonder en mars 2020 sa propre entreprise théâtrale, la Kleine Compagnie. Près de deux ans plus tard, l’artiste déplore le manque de ressources humaines et financières qui afflige le théâtre en milieu minoritaire.
Marine Ernoult – Francopresse
Anaïs Pellin, comédienne, autrice et metteuse en scène, a fondé sa compagnie de théâtre jeune public, la Kleine Compagnie, en mars 2020. (Photo : Emilie Leclerc)
« La communauté francophone de Vancouver est animée d’une véritable envie de se rassembler autour des arts, d’une vie culturelle qui se démarque de la vie culturelle anglophone et qui apporte un autre regard », partage Anaïs Pellin, originaire de Bruxelles en Belgique.
Arrivée il y a cinq ans en Colombie-Britannique (C.-B.), la comédienne de formation, également titulaire d’une maitrise en études théâtrales, ne s’attendait pas à s’épanouir si rapidement sur le plan artistique. « J’ai été surprise de découvrir un milieu culturel francophone foisonnant, d’une grande richesse », témoigne la trentenaire.
Anaïs s’installe à Vancouver en juillet 2016 avec le projet d’apprendre l’anglais, tandis que son compagnon commence un postdoctorat à l’Université de Colombie-Britannique. « On avait toujours eu envie de vivre une expérience à l’international, c’était une occasion unique pour nous deux », résume-t-elle.
À ses débuts, l’artiste prend contact avec La Seizième, le théâtre francophone de Vancouver, tout en travaillant comme vendeuse et barista. À peine deux mois après son emménagement, elle décroche ses premiers « petits » contrats dans le milieu théâtral. Elle anime des ateliers, rejoint une troupe d’improvisation semi-professionnelle.
Puis, en février 2017, elle devient assistante à la mise en scène de la pièce Bonjour, là, bonjour(Leméac Éditeur, 1974) de l’auteur québécois Michel Tremblay. Elle découvre alors le théâtre classique québécois et rencontre de nombreux acteurs installés à Vancouver. Ce sera sa porte d’entrée dans la communauté artistique de C.-B.
Rapidement, celle qui est à la fois autrice, metteuse en scène et comédienne a la possibilité de monter ses propres projets. Elle collabore avec l’Alliance française de Vancouver et plusieurs compagnies de théâtre d’objets à travers le pays. Sa pièce pour jeune public Clémentine – Une histoire (vraie), qui parle de séparation, se joue ainsi à La Seizième mais aussi à Montréal, en partenariat avec la troupe La Pire Espèce.
Anaïs Pellin a joué la pièce pour jeune public Clémentine – Une histoire (vraie), qui parle de séparation,à travers le pays et notamment à l’Alliance française de Vancouver. (Photo : Gaëtan Nerincx)
Dans un autre spectacle pour enfant présenté à la rencontre biennale Zones théâtrales, à Ottawa, Anaïs, seule en scène, s’entoure de multiples objets pour raconter à sa façon La petite sirène, le célèbre conte danois de Hans Christian Andersen.
Depuis deux ans, elle est également soutenue par la compagnie anglophone Presentation House Theatre (PHT), basée à North Vancouver. Ces différents succès l’ont décidée à fonder sa propre compagnie jeune public, la Kleine Compagnie, en mars 2020.
Anaïs Pellin, comédienne, autrice et metteuse en scène, a fondé sa compagnie de théâtre jeune public, la Kleine Compagnie, en mars 2020. (Photo : Emilie Leclerc)
Difficultés de recrutement et de financement
Aux yeux de la jeune femme, faire du théâtre en français en milieu minoritaire reste néanmoins un défi. Trouver des acteurs, des metteurs en scène ou des scénographes francophones constitue la première des difficultés.
« Ils sont peu nombreux et très demandés, explique Anaïs. On est obligés de faire venir des gens d’autres provinces, de Montréal notamment, ce qui coute beaucoup plus cher. »
À ce problème de recrutement s’ajoute celui du financement insuffisant. Si Anaïs s’estime bien aidée par Ottawa, en particulier par le Conseil des arts du Canada, elle déplore le manque de soutien du gouvernement provincial.
« Il y a déjà très peu de budget pour le domaine artistique, alors il y en a encore moins pour le secteur francophone, souligne-t-elle. On aimerait que notre province ait une sensibilité plus grande à la culture en milieu minoritaire, qu’elle valorise davantage ses artistes qui parlent français. »
L’artiste pointe par ailleurs les difficultés à atteindre le jeune public francophone : « C’est complexe, car il faut passer par le système des conseils scolaires, qui est assez fermé. Amener les écoles au théâtre, faire venir les classes dans les salles de spectacle est loin d’être évident », révèle Anaïs, qui évoque également le manque de visibilité et le cout prohibitif de la culture en milieu minoritaire.
« On a eu un coup de foudre pour le Canada »
Malgré ces défis, la Canadienne d’adoption affirme s’épanouir sur le plan professionnel, mais aussi social. Après cinq années sur la côte ouest, elle se dit parfaitement intégrée à la communauté.
« Les gens sont super accueillants et solidaires. J’ai créé des liens forts avec des francophones du monde entier, notre côté déraciné contribue à nous rassembler », confie l’expatriée.
Anaïs n’a toutefois pas oublié sa Belgique natale — « ses frites et son chocolat » — ni sa famille, restée au « plat pays ». Les deux dernières années de pandémie ont été particulièrement éprouvantes pour elle : « Je suis en contact régulier avec mes proches, mais avant l’automne dernier, je n’ai pas pu les voir pendant deux ans. »
La trentenaire, qui a fait sa demande de citoyenneté, n’envisage pas pour autant de rentrer en Europe.
« On a eu un véritable coup de foudre pour le Canada, pour la gentillesse et l’ouverture d’esprit des gens qui manquent de l’autre côté de l’Atlantique, raconte-t-elle. Le cadre naturel est aussi extraordinaire, avec les montagnes surplombant la ville, la plage à cinq minutes… J’ai le sentiment d’être en vacances toute l’année ! »
Anaïs Pellin a eu un véritable coup de foudre pour la Colombie-Britannique et ses paysages spectaculaires, notamment le lac Joffre qu’on voit ici. (Photo : Courtoisie Anaïs Pellin
Jamais à court de projets, la comédienne partira en tournée dans l’Ouest canadien avec la pièce Le merveilleux voyage d’Inès de l’Ouest de Rébecca Déraspe au printemps 2022.
Au travers des incertitudes liées à la pandémie, certaines histoires ressortent comme autant de bouffées d’air et d’espoir. C’est notamment le cas de nombreux francophones qui ont choisi le Canada comme terre d’accueil, il y a de cela quelques mois ou des années. Francopresse vous présente quelques-unes de leurs histoires d’immigration, un clin d’œil à la vie qui continue même quand tout le reste s’arrête.