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Une vie de couple dédiée à l’entraide

Robert et Louise Deguire ont donné beaucoup. Retraités, ils continuent dutiliser leur savoir-faire manuel pour aider leur prochain. Un savoir-faire qui se perd à travers les générations.

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Charles Fontaine – IJL – Réseau.Presse Le Droit

 La mignonne maison où le couple de Casselman demeure a été bâtie par le père de Robert Deguire en 1952. « Il a acheté une caisse de bière, ça, c’est numéro un, raconte M. Deguire. Ils étaient 10 personnes ? Tout le monde travaillait. Couler le ciment, pis ça mettait toute l’épaule à la roue jusqu’à tant que la maison soit montée. Pis ça coûtait rien, là. C’était tous des gens qui venaient donner un coup de main. S’entraider ! Après la journée, ils prenaient leur p’tite bière, ils s’en retournaient chez eux, pis le lendemain ils revenaient, pis c’était encore pareil. »

« Tu ne vois plus ça aujourd’hui », ajoute sa conjointe Louise.

L’homme de 83 ans est aussi manuel que son père. Lorsque le couple est revenu dans leur village natal après avoir vécu et travaillé à Ottawa, M. Deguire a complètement rénové la maison familiale. Pourtant, il a travaillé comme technologue en électronique au gouvernement fédéral, mais jamais en construction.

« Mon père avait une petite shop en arrière et je lui donnais un coup de main de temps en temps. C’est venu comme ça, je ne sais pas, j’aime ça », dit-il.

« On apprend par ses erreurs ! », ajoute Louise Deguire.

Le couple retraité depuis 1998 aide de nombreux organismes. Mais ils souhaitent se tenir loin des foules. Durant la journée, Robert effectue du travail manuel dans son atelier derrière sa maison. Pendant ce temps, Louise coud différents tissus à l’étage et les deux se réunissent pour dîner.

Bénévolat

« Vous m’emmenez votre matériel, je construis dans ma shop, vous venez le chercher et ça ne coûte rien », résume celui qu’on surnomme « Bobette ».

Le couple a été très surpris quand on leur a remis le Prix JP St. Pierre. Lors du Banquet du président des Comtés unis de Prescott et Russell (CUPR), ils ont reçu une plaque pour reconnaître leur engagement communautaire.

« Le prix, je ne sais pas qui a donné notre nom. On était invité à un souper, pis la première chose qu’on sait ! […] J’en ai eu partout des plaques de reconnaissance. C’est beau, mais ce n’est pas ça qui compte », souligne M. Deguire.

« Pourquoi nous autres ? Il y en a plein qui font du bénévolat », ajoute son épouse.

Robert Deguire a agi comme pompier volontaire à Casselman. Louise cousait des écussons pour les pompiers. « Ils étaient de toutes les activités de financement, affirme le chef des pompiers volontaires, Alain Ménard. Robert est habile dans tout, c’est une aide très utile, un gros morceau dans l’équipe. »

Il a aussi aidé son bon ami Gille Desnoyers au Comptoir populaire Deguire. « Si Robert n’était pas là, le comptoir et la paroisse ne seraient pas ce qu’ils sont aujourd’hui. Quand on lui demande quelque chose, il le fait tout de suite et on sait que ce sera fait à 100 %. Chaque village aimerait avoir quelqu’un comme lui », mentionne le président du cimetière de la paroisse Saint-Euphémie et ancien gérant du Comptoir populaire Deguire pendant 17 ans.

  1. Deguire a construit des petites cabanes pour le Festival de Noël et des cabanes d’oiseaux qu’il a vendues au profit de la Société canadienne du cancer. « Il faut se tenir occupé, c’est pour ça qu’on fait du bénévolat ! »

Cette volonté d’aider vient de son père qui travaillait dans une manufacture à Casselman. « Il était dans tous les mosus de comité qu’il peut y avoir, même quand il travaillait », se rappelle-t-il.

On assume rapidement que le couple préfère donner que recevoir. C’est la satisfaction de l’autre qui les rend heureux. « Moi, je prends les gens comme ils sont, lance M. Deguire. Il y en a qui ont des qualités, d’autres des défauts. Moi je ne vois pas les défauts. Ça me fait énormément plaisir de leur donner un coup de main. Ma récompense, c’est de voir qu’ils l’apprécient.

Limportance du savoir-faire manuel

Robert Deguire est un vrai homme à tout faire. Il a appris en observant ses ancêtres ainsi que par essais et erreurs. Son objectif est de léguer son savoir-faire aux jeunes générations.

« J’ai certaines compétences, un certain savoir-faire. Je ne veux pas mourir avec ça, si je peux le passer à d’autres, tant mieux, c’est ça mon but. »

Mais, il observe que les compétences manuelles s’effritent avec le temps.

« Aujourd’hui, les gens achètent du neuf au lieu de réparer. »

« Le monde n’a pas le temps, je ne sais pas pourquoi », mentionne Louise.

Selon Robert, on ne peut pas revenir au temps où la compétence manuelle était la norme. « Si je t’enlève ton téléphone qu’est-ce que tu vas faire ? », demande-t-il au journaliste qui enregistre la conversation au lieu de prendre des notes.

Aînés dévalorisés

Même après avoir reçu ce prix, « Bobette » affirme que les personnes âgées et les bénévoles ne sont pas assez respectés dans notre société. « C’est un manque énorme. Que les vieux qui connaissent le métier n’ont pas eu la chance de transmettre leur savoir-faire à la jeunesse. Je trouve ça très dommage, parce que les vieux ont travaillé fort pour ça », martèle-t-il avec son poing sur la table.

Par exemple, il trouve que les modes de communication en ligne sont utilisés de manière trop naturelle. « Il y a un certain pourcentage d’aînés qui n’ont pas d’ordinateurs et d’iPhone. C’est un manque de respect pour les personnes âgées. »

« Il n’y a rien qu’on puisse faire. Les vieux sont tassés dans le coin », ajoute-t-il, la gorge gonflée d’émotion.

  1. Deguire affirme aussi que la municipalité de Casselman « met des bâtons dans les roues » des bénévoles. « Il y a toujours un formulaire à signer pour que l’organisation ne soit pas responsable des bénévoles en cas d’accident. C’est insultant! Si je me casse un bras, appelle une ambulance, pis ça fini là! Si t’as peur de te faire mal, ne viens pas ! »

« Le jour où un village n’aura plus de bénévoles, ce sera un village mort », conclut-il.

« Monsieur et Madame Bobette », que tout le village connaît, ralentissent un peu la cadence de leur travail bénévole. Toujours en bonne santé, ils continuent toutefois d’aider leur prochain en se satisfaisant du sourire de l’autre.

Photos

Robert et Louise Deguire (Étienne Ranger, Le Droit)

Louise Deguire (Étienne Ranger, Le Droit)

Robert Deguire (Étienne Ranger, Le Droit)