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Une fois de plus, les plus démunis de la fonction publique se feront imposer par la force une convention collective non négociée pour les quatre prochaines années. Alors que les employés sont rois et maitres de travailler où ils veulent, le gouvernement de l’Ontario ne fait absolument rien pour tenter de retenir ses meilleurs éléments. 

Je n’ai jamais été un grand syndicaliste. J’ai travaillé pour deux entreprises avec un syndicat et aux deux endroits, les syndicats m’ont beaucoup plus nui qu’autre chose. Cela étant dit, le syndicat a été plus que nécessaire à une certaine époque. D’autres diront qu’il a parfois été trop gourmand et plusieurs prétendent qu’il est responsable de fermetures d’entreprises. Tout le monde a son opinion, mais jusqu’à preuve du contraire, le syndicat fait toujours partie du décor. C’est un droit d’être syndiqué. D’ailleurs, des lois encadrent tous les processus de négociation et on se doit de les respecter. 

Depuis qu’ils sont au pouvoir, le premier ministre Doug Ford et son équipe démontrent qu’ils ne sont pas vraiment de grands défenseurs des droits des travailleurs et de leur syndicat, surtout celui de la fonction publique. 

Les employés de soutien dans les écoles passent actuellement dans le tordeur. Ils n’ont pas vraiment les salaires les plus élevés de la fonction publique. Certains d’entre eux gagnent environ 18,75 $ l’heure. 

Les progressistes-conservateurs veulent imposer à ces syndiqués une convention collective de quatre ans limitant les hausses salariales à 2,5 % par année aux employés gagnant moins de 43 000 $ et à 1,5 % pour les autres. Plus concrètement, on parle d’une augmentation d’environ 0,45 $ de l’heure. 

Le Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP) réclame des augmentations de 11,7 %, affirmant qu’il s’agit des travailleurs les moins payés en éducation en plus de ne jamais avoir obtenu d’augmentation significative depuis des années. 

L’écart entre les deux parties est énorme. Mais, il ne faut pas oublier que ce groupe de travailleurs se fait imposer des conventions collectives depuis 2012. Cette année-là, les libéraux avaient prescrit le projet de loi 115 qui gelait les salaires et limitait le droit de grève des membres syndiqués. En 2018, cette catégorie d’employés a obtenu des progressistes-conservateurs fraichement en poste une autre convention collective imposée, mais avec une augmentation de salaire de 1 % par année. On parle de 0,15 $ à 0,25 $ l’heure d’augmentation. 

Dans ce conflit, ce n’est pas vraiment l’augmentation de salaire qui est le plus problématique à mes yeux. En 2022, les travailleurs veulent être respectés, sinon ils ne craignent pas de quitter un emploi pour un autre moins payant. Ici, le gouvernement n’a clairement aucun estime pour ses employés. Non seulement il leur retire le droit de manifester, mais il les menace d’utiliser la dérogation s’ils osent porter l’affaire devant les tribunaux. 

La troupe de Doug Ford remportera cette manche, mais les conséquences seront lourdes à long terme, étant donné que les temps ont bien changé. 

Autrefois, le taux de chômage était plus élevé et tout le monde souhaitait obtenir un poste à la fonction publique. On les recherchait pour la sécurité d’emploi, le salaire et les avantages sociaux. Les gouvernements pouvaient bien imposer des contrats de travail, ils avaient le gros bout du bâton. 

Aujourd’hui, et encore plus depuis les cinq dernières années, la sécurité d’emploi ne compte plus, les salaires des fonctionnaires ne se démarquent plus autant et les avantages sociaux sont offerts pratiquement partout. 

Le gouvernement Ford peut imposer ses quatre volontés, mais je suis persuadé que plusieurs des meilleurs éléments parmi les aides- enseignants, les concierges et le personnel administratif quitteront le navire. Les plus âgés devanceront leur retraite, les autres se dénicheront un emploi dans des entreprises qui les respectent, et ce, peu importe le salaire. 

Ce n’est vraiment pas le temps de perdre des bons travailleurs en cette période de pénurie de main-d’oeuvre. 

De plus, quel beau message on lance aux étudiants à la recherche d’une carrière : n’étudiez surtout pas pour devenir aide-enseignant, il n’y a pas d’avenir là-dedans. 

Il est aujourd’hui plus payant d’être un simple cuisinier dans un restaurant McDonald’s qu’être travailleur de soutien en éducation. De plus, il y a au moins des possibilités d’avancement au McDo; tu peux devenir chef d’équipe ou de quart, ou encore gérant à des salaires vraiment concurrentiels. Et, ce n’est pas une blague, selon le site d’emploi Indeed, un chef de quart au McDonald’s peut gagner jusqu’à 28,45 $/h au Canada. 

Le premier ministre Ford dit qu’il « défend les parents et les élèves » avec sa loi spéciale, pour s’assurer que les « élèves restent en classe ». Que les jeunes restent en classe c’est une chose, mais peut-on s’assurer qu’il y ait des personnes qualifiées, attentionnées et heureuses d’être là pour eux ? Je crains le jour ou des écoles seront fermées par marque de personnel.