Skip to content

ÉMILIE GOUGEON-PELLETIER

Initiative de journalisme local — Le Droit

Le gouvernement Ford manque de transparence en matière de logement abordable, selon l’opposition.

La province veut demander à 30 villes ontariennes de lui soumettre, quatre fois par année, des informations au sujet de la construction de logements.

Avec ce nouveau projet de règlement rendu public cette semaine, le ministère des Affaires municipales et du Logement espère accéder aux renseignements nécessaires pour prendre des décisions sur les politiques à venir en matière de logement et d’aménagement.

L’objectif est aussi de surveiller les progrès liés au « Plan d’action pour l’offre de logements de l’Ontario », qui comprend la construction de 1,5 million de foyers sur une période de 10 ans.

La porte-parole néo-démocrate en matière de logement Jessica Bell salue les intentions du gouvernement Ford d’accroître la transparence, mais l’accuse d’avoir manqué son coup.

La province a établi une liste détaillée de données qu’elle aimerait recevoir des villes, mais la députée torontoise constate que le logement abordable n’y figure pas.

Données que les municipalités devront communiquer à la province

  • Demandes de modification du plan officiel
  • Modifications du règlement municipal de zonage
  • Plans de condominium
  • Plans de lotissement
  • Demandes relatives au plan d’implantation
  • Morcellement des terres (autorisations)
  • Dérogations mineures
  • Nombre de logements construits de plein droit

« Nous sommes d’accord avec le projet de règlement. La province ordonne aux municipalités de suivre et de rendre compte publiquement de leurs progrès pour approuver la construction de nouvelles maisons. Plusieurs experts ont clairement indiqué que l’Ontario devait construire 1,5 million de logements supplémentaires au cours de la décennie. C’est bien. Ce qui m’inquiète, c’est que le gouvernement n’ordonne pas aux municipalités de suivre les approbations de logements abordables, malgré la crise de l’abordabilité des logements qui fait rage en Ontario. »

« Une fois de plus »

L’omission du logement abordable à la liste démontre « une fois de plus » que le gouvernement Ford « ne s’est jamais intéressé » à ce sujet, tranche la directrice générale de l’Alliance pour mettre un terme à l’itinérance à Ottawa, Kaite Burkholder Harris.

Cette dernière est sceptique face à l’approche choisie par la province pour la collecte de données.

« Je ne peux pas croire qu’ils demandent aux villes, qui sont déjà tellement submergées par les exigences de rapports, de fournir ces données sur une base trimestrielle. C’est ce qui est si frustrant, surtout parce que ces données ne nous disent pas grand-chose. »

Kaite Burkholder Harris

Elle souligne que ça en vaudrait la chandelle si au moins des données concernant la taille et le type des logements construits étaient exigées aux municipalités.

Pourtant, dans sa présentation du projet de règlement, le ministère des Affaires municipales et du Logement cite un rapport du Groupe d’étude sur le logement abordable qui note justement de l’importance des données portant sur le type des logements construits.

Ce rapport publié il y a un an recommandait notamment de « déclarer chaque année, à l’échelle municipale et provinciale, tout écart entre la demande et l’offre selon le type de logement et l’emplacement et rendre les données sous-jacentes librement accessibles au public ».

Le Groupe d’étude sur le logement abordable disait aussi qu’il « sera également important de disposer de meilleures données pour évaluer la quantité de nouveaux logements disponibles pour les groupes qui ont été exclus de manière disproportionnée de l’accession à la propriété et du logement locatif ».

Pas la première fois

Ce n’est pas la première fois que le gouvernement Ford est accusé de manquer de transparence et d’engagement lorsqu’il est question d’accès au logement abordable.

La vérificatrice générale de l’Ontario Bonnie Lysyk a blâmé le gouvernement provincial pour la crise d’abordabilité du logement et d’itinérance en Ontario dans un rapport publié en décembre 2021.

« L’Ontario n’a pas de cadre global et de stratégie provinciale coordonnée pour prévenir et réduire l’itinérance », écrivait-elle.

Son rapport, adressé au ministère des Affaires municipales et du Logement, faisait état d’un manque de suivis, de collectes de données et de surveillance des dépenses, notamment à propos des services offerts aux personnes en situation d’itinérance.

« La plupart du travail effectué pour lutter contre l’itinérance est propre à chaque ville et, par conséquent, il n’existe qu’une mosaïque de données, ce qui rend difficile la compréhension systémique de l’état de l’itinérance en Ontario. »

Le ministère des Affaires municipales et du Logement avait répondu au rapport de la VG en disant qu’il prenait son rôle « au sérieux et [qu’il] travaille en étroite collaboration avec des partenaires municipaux et avec l’Alliance canadienne pour mettre fin à l’itinérance afin de mieux comprendre les problèmes qui contribuent à l’itinérance et de mieux mettre les gens en contact avec des logements et des soutiens locaux qui répondent à leurs besoins ».

Une abondance de logements

Le ministre des Affaires municipales et du Logement Steve Clark n’était pas disponible pour une entrevue, mais son attachée de presse Victoria Podbielski a répliqué aux critiques de Jessica Bell dans un courriel envoyé au Droit.

« Le NPD s’oppose à la construction de plus de maisons à chaque occasion, y compris en votant contre trois de nos derniers plans d’action pour l’offre de logements. »

Dans la même déclaration, le bureau du ministre Clark accuse le NPD de « continuer de défendre des politiques de statu quo », fustigeant au passage la néo-démocrate Jill Andrews pour avoir déjà déclaré que « plus de maisons n’est pas nécessairement la solution ».

Or, la DG de l’Alliance pour mettre un terme à l’itinérance à Ottawa abonde dans ce sens, elle aussi. « Il y a des données à l’échelle nationale selon lesquelles nous avons en fait une plus grande offre de logements pour les ménages que notre taux de croissance démographique réel. Donc on a une abondance de maisons, mais sur le marché, de plus en plus de personnes possèdent plusieurs propriétés. »

Le ministère des Affaires municipales et du Logement a donné 30 jours au public pour lui envoyer des commentaires par rapport à son projet de règlement, qui devrait être intégré à la Loi sur l’aménagement du territoire après le 8 mars.

Photo : Archives la presse Canadienne, Frank Gunn