Le Grand Magal de Touba à l’Université de Hearst a été le temps d’une journée de célébration très riche en spiritualité et en convivialité. Organisée par la communauté mouride locale, cet évènement annuel, profondément ancré dans la tradition musulmane sénégalaise, rend hommage au fondateur de la confrérie mouride, Cheikh Ahmadou Bamba Mbacké, et célèbre son exil comme un acte de foi et de gratitude envers Dieu.
Ce grand rassemblement a été organisé à Hearst par la Daara hisbut tarqiyyah, regroupant une centaine de personnes dans une atmosphère de ferveur religieuse et d’unité communautaire. Pour mieux comprendre le fonctionnement de l’évènement, ce sont Serigne Aliou Bousso, président du comité d’organisation et secrétaire général de la Daara hisbut tarqiyyah de Hearst, Serigne Ibra Samb, président du comité de culte et Mame Diarra Guèye, responsable chargée de la cuisine qui vont donner une parfaite explication de la célébration.
Serigne Aliou Bousso
Originaire du Sénégal, Serigne Aliou Bousso a nouvellement obtenu son baccalauréat en gestion à l’Université de Hearst en juin 2024. En tant que président du comité d’organisation et responsable moral de la Daara Hisbut Tarqiyyah de Hearst, il a fait une présentation détaillée concernant l’historique du Grand Magal de Touba.
Dans son discours, Serigne Bousso a relaté l’arrestation de Cheikh Ahmadou Bamba le samedi 18 Safar 1313 de l’égire (10 aout 1895) à Djéwal, dans l’actuelle région de Louga au Sénégal, par les autorités coloniales françaises. Après un procès expéditif, le Cheikh fut exilé au Gabon pendant sept longues années et huit mois, une épreuve qu’il choisit de transformer en un acte de reconnaissance envers le Tout-Puissant. « C’est cette date du 18 Safar que Khadimou Rassol (le serviteur du prophète Mouhamed paix et salut sur lui), mieux connu sous le nom de Serigne Touba, a choisie comme jour d’action de grâce et de fête. Rares sont ceux qui ont choisi le jour où toutes leurs épreuves ont commencé pour célébrer une fête et remercier Dieu », a rappelé Serigne Aliou Bousso lors de son intervention, tout en captivant l’attention de l’auditoire avec son récit passionnant sur la vie du Cheikh et son parcours spirituel. M. Bousso a fait aussi un rappel dans son discours sur les propos de Serigne Abul Lahat Mbacké (3e khalif général des mourides), selon qui c’est en 1921 à Diourbel (une région au Sénégal) que le Cheikh lança son célèbre appel : « Quant au Bienfait que Dieu m’a accordé, ma seule et souveraine Gratitude ne le couvre plus, par conséquent j’invite toute personne qui se réjouit de mon bonheur personnel à s’unir à moi dans la reconnaissance éternelle à Dieu, chaque fois que l’anniversaire de ce jour-là se trouve sur terre ».
Serigne Ibra Samb
Après avoir obtenu son Master de vétérinaire en 2021, Serigne Ibra Samb, originaire du Sénégal est au Canada depuis décembre 2021 où il a eu son certificat en biologie médicale à l’Université du Québec à Trois-Rivières en 2022 et son baccalauréat en psychologie à l’Université Hearst en juin 2024. Le Grand Magal de Touba à Hearst n’a pas seulement été une occasion de commémoration, mais également un moment de recueillement spirituel pour la communauté, d’après M. Samb.
En tant que président du comité de culte, il a pris en charge l’organisation des prières et des lectures du Saint Coran et des activités qui ont débuté dès les premières heures de la journée. « Nous avons dirigé la lecture du Saint Coran avec mon équipe et offert des explications sur l’exposition consacrée à la vie et l’oeuvre de Cheikh Ahmadou Bamba, » a déclaré Serigne Ibra, qui a fait ressortir cette dimension éducative et spirituelle.
Le soir, l’atmosphère de la fête a pris une tonalité plus musicale avec des chants religieux interprétés par un groupe de disciples mourides résidant à Hearst. Sous la direction de Serigne Ibra, les participants ont chanté les Khassaides, des poèmes et des vers écrits par Cheikh Ahmadou Bamba, sur le Prophète Mohammed et le bon Dieu, dans une ambiance de dévotion très intense. « Chaque dimanche, nous nous réunissons à l’Université de Hearst à partir de 19 h pour des répétitions afin de maintenir l’harmonie dans les chants », a expliqué Serigne Ibra tout en soulignant aussi l’importance de la préparation et de l’entrainement pour ces performances religieuses. D’après M. Samb, pour les membres de la Daara Hisbut Tarqiyyah de Hearst, il ne s’agissait pas simplement de célébrer une fête religieuse, mais de créer un espace de partage et de communion autour des valeurs du mouridisme. « En tant que membre de la Daara Hisbut Tarqiyyah, diriger les activités de culte vient de l’appel du Khalif général des mourides qui recommande à chaque disciple mouride d’effectuer au moins trois récitals du Saint Coran pour célébrer le Magal de Touba », a précisé Serigne Ibra Samb tout en ajoutant que l’évènement est un moyen de renforcer la foi de chaque participant.
Serigne Ibra a rappelé que le Grand Magal de Touba est une journée de réjouissance, de prière et de reconnaissance qui va bien au-delà des frontières du Sénégal, atteignant des communautés mourides à travers le monde. À Hearst, cette célébration a permis de renforcer les liens entre les membres de la communauté locale tout en honorant la mémoire de Cheikh Ahmadou Bamba et en perpétuant ses enseignements.
Mame Diarra Guèye
Ayant nouvellement obtenu son diplôme de baccalauréat en ges-tion à l’Université de Hearst, Mame Diarra Guèye, originaire du Sénégal, a assuré le succès du Grand Magal de Touba à Hearst avec une organisation logistique précise et bien orchestrée. En tant que responsable de la cuisine, Mame Diarra précise que le Grand Magal de Touba est bien plus qu’une simple fête : c’est un acte de foi et un hommage à son guide spirituel. « Cette fête est cruciale pour moi en tant que disciple mouride, c’est pourquoi je la célèbre avec une grande fierté », a-t-elle confié. Mme Guèye et son équipe ont débuté la journée en préparant un petit-déjeuner composé de croissants, de café Touba et de bouye laté, un dessert à base de fruit de baobab très prisé au Sénégal. Le déjeuner consistait en un plat traditionnel de riz au poisson, suivi de divers mets entre le diner et le souper pour s’assurer que les invités soient bien nourris tout au long de la journée. Le soir, un festin de poulet, de viande et de vermicelle a été servi, couronnant ainsi une journée de célébrations culinaires variées.
« Les invités nous ont félicités pour notre préparation et ont dit qu’ils se sentaient comme s’ils célébraient la fête au Sénégal », a ajouté Mame Diarra, en mentionnant aussi que l’équipe avait commencé les préparatifs trois mois à l’avance, avec des achats spécifiques réalisés à Montréal pour garantir l’authenticité des plats.
Pour Mme Guèye, l’impact de cet évènement s’est ressenti bien au-delà des murs de l’Université de Hearst. Les participants ont exprimé leur joie et leur gratitude d’avoir pu vivre un moment aussi spécial, loin de leur terre natale. Pour beaucoup, ce Grand Magal a été une source de renouveau spirituel et de réaffirmation de leur engagement envers les enseignements de Cheikh Ahmadou Bamba.
Bref, le Grand Magal de Touba est donc avant tout une fête de reconnaissance envers Dieu, un moment pour exprimer sa gratitude et renforcer sa foi.
Photos : Ndery Dione