Thérèse raconte : Les funérailles de l’ancien temps

Quand j’étais jeune, il n’y avait pas de salon funéraire. Lorsqu’une personne mourait, on lui construisait un cercueil en bois qu’on recouvrait de satin à l’intérieur et d’un autre tissu à l’extérieur (habituellement du velours foncé). On y déposait le corps de la personne décédée et on plaçait la boite dans le salon. En tout temps, il devait y avoir une personne de la famille près du corps. Cela s’appelait « veiller au corps ». Aussi, on disait de la personne décédée : « il/elle est sur les planches ». Il était d’usage de faire des sandwichs pour les visiteurs, car les voisins, les amis, la parenté venaient visiter la famille en deuil. Après une couple de jours, le corps était amené à l’église pour le service funéraire. Bien souvent, il était transporté dans une voiture tirée par des chevaux. (Il faut dire que les autos étaient très rares à ce moment, surtout à la campagne où les chemins étaient pratiquement impassables pour les automobiles.) 

Quand il y avait une mortalité au village, tout le monde se donnait la main pour venir en aide à la famille éprouvée. On aidait à construire le cercueil, on faisait des sandwichs, on aidait à veiller au corps, on avait soin des enfants, etc. 

Je me souviens d’une dame de notre village qui est morte pendant une grosse tempête : éclairs et tonnerre. Les rumeurs voulaient qu’elle soit morte frappée par un éclair, d’autres croyaient que c’était une attaque de coeur, on disait même qu’elle serait morte de peur à cause de la tempête. On ne le saura jamais. C’était bien triste : elle était mère de 13 enfants. Son corps a été exposé à la maison. Près de la porte, à l’extérieur, on avait mis un grand ruban noir pour indiquer que cette famille était en deuil. Ce ruban s’appelait un crêpe. 

Quand un membre de la famille proche mourait, les autres membres devaient porter le grand deuil pendant toute une année, c’est-à-dire qu’ils devaient porter des vêtements noirs seulement. Puis suivait une autre année de demi-deuil où on pouvait ajouter du blanc, mais aucune couleur. Pour ceux qui n’avaient pas de vêtements noirs, ils devaient porter un ruban noir autour du bras. Je me souviens de la famille d’oncle Sébastien, décédé d’une attaque de coeur à l’âge de 33 ans, laissant sa femme et trois enfants. Ma cousine, Laurette (Villeneuve Groleau) avait environ 7 ou 8 ans. Elle était habillée en noirÇa faisait triste. Cette coutume visait à montrer du respect pour la personne morte. Il me semble que ça ne faisait que prolonger la peine. Qu’est-ce que tu en penses ? 

Je te raconte cela pour te montrer que les choses ont vraiment changé depuis mon enfance. Il s’agit de s’adapter à ce que la vie nous présente. C’est le secret du bonheur.