L’Université de Hearst connait une baisse du taux d’inscriptions d’étudiants internationaux, un scénario moins catastrophique qu’anticipé compte tenu de la baisse du nombre de permis délivrés imposé par le gouvernement fédéral. En janvier, le ministre Marc Miller avait annoncé cette diminution de 35 % à l’échelle du pays, mais qui équivaut à 50 % pour l’Ontario, étant la province la plus peuplée.
Le président d’Université Canada, Gabriel Miller, a déclaré la semaine dernière que le nombre d’inscriptions d’étudiants internationaux dans les universités du pays a chuté sous le plafond fixé cette année par le gouvernement fédéral.
La rectrice de l’Université de Hearst, Aurélie Lacassagne, dit que son équipe est rassurée quant aux inscriptions d’étudiants internationaux, la baisse est moins importante qu’anticipée. « Nous avons moins d’inscriptions qu’on aurait souhaité, mais nous avions envisagé un scénario “catastrophe” lorsque la nouvelle est tombée. Il faut voir que l’IRCC (Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada) ne comprend pas du tout ce qu’est le calendrier universitaire », déplore la rectrice.
Le plus grand facteur qui a influencé cette baisse, selon Mme Lacassagne, c’est qu’au moment où le gouvernement faisait cette annonce, le processus d’inscription était entamé depuis quelques mois déjà. Le recrutement se fait pendant l’automne pour débuter l’examen des demandes le plus tôt possible. « Nous, au mois de mai, en théorie, nous savons déjà combien de personnes arrivent en septembre. Tout ça s’est déroulé en hiver. La province a pris la bonne décision de donner ses permis d’études aux collèges et universités publiques. Toutefois, il fallait le temps que la province prenne sa décision, le temps qu’on arrive à négocier pour les établissements minoritaires francophones et qu’on s’arrange pour que le système soit mis en place. »
Selon la rectrice, le travail s’est effectué rapidement, malgré le retard sur le calendrier que cela a engendré, l’attente a été au niveau de la livraison de permis d’études dans les consulats et les ambassades par l’IRCC. « Ce qui signifie qu’en juin, nous ne savions toujours pas combien d’étudiants avaient complété tout le processus. Nous étions un peu en mode panique, donc l’IRCC a emboité le pas et fait son travail. Je dirais que la baisse que l’on connait en septembre est liée au retard des lettres d’attestation, mais surtout aux problèmes de fonctionnement du ministère. »
Malheureusement, tous les étudiants ayant reçu leur permis d’études au milieu de l’été n’ont pas pu rejoindre les bancs de classe à l’UdeH, puisque l’établissement demande aux nouveaux venus de présenter une preuve de logement avant qu’ils puissent commencer les cours. « C’était trop tard pour ces étudiants, puisqu’habituellement, on leur demande d’arriver assez tôt, autour du 22 juin, pour qu’ils puissent faire de l’orientation, qu’ils s’acclimatent. Ici, les étudiants n’arrivent pas la journée avant la rentrée des classes », poursuit la rectrice.
Les données partagées par l’Université de Hearst démontrent que le nombre d’inscriptions de nouveaux étudiants en provenance de l’international est passé de 70 à 46 individus en comparant les inscriptions de la session d’automne 2023 à celle de cette année.
Pour ce qui est du total, le nombre d’inscriptions au premier semestre de cette année est de 313 étudiants, en comparaison à 335 à l’automne 2023. C’est donc une légère baisse de 4 %.
La registraire de l’établissement, Sylvie Roy, explique que les données de l’Université de Hearst sont en fait des données réelles puisque leur processus d’inscription est plus rigoureux qu’ailleurs. « Les étudiants internationaux se doivent d’avoir une preuve de logement avant de commencer leurs études. Avec la pénurie de logements qui sévit partout, nous nous engageons à faire en sorte que nos étudiants n’arrivent pas ici et qu’ils vivent dans la rue. »
Au fil du temps, le manque de logements a fait en sorte que l’équipe de l’Université a dû être créative et l’une des initiatives, soit de jumeler les étudiants avec des personnes seules, a donné lieu à de belles histoires. Un témoignage a été partagé sur leurs réseaux sociaux.
Étudiants canadiens
Pour ce qui est des étudiants en provenance de la francophonie canadienne, les comparaisons d’année en année, lorsque calculées en pourcentage, les données démontrent soit une grande hausse ou une grande baisse. « Puisque les chiffres sont petits, lorsqu’on passe de 25 à 15 élèves une année par exemple, ça équivaut à 40 % de baisse, mais en réalité c’est seulement 10 personnes. On a toujours relativement peu de Canadiens, il faut donc parler en chiffre absolu et non en pourcentage », explique-t-elle.
Le recrutement est un défi de taille auprès des jeunes ayant grandi dans le Nord de l’Ontario, car en réalité la plupart ont envie d’aller vivre une expérience dans les grands centres comme Ottawa et Sudbury. « Je peux faire tous les efforts possibles en recrutement, c’est juste un effet totalement normal, il n’y a pas grand-chose à faire pour cela. Cependant, la chose que je peux faire c’est du développement de programme, notamment dans les cycles supérieurs, afin d’avoir quelque chose pour ces jeunes qui ont envie de revenir après quatre ans d’études. »
Madame Lacassagne souligne aussi l’importance d’avoir les étudiants internationaux pour maintenir la pérennité de la communauté, puisqu’ils fournissent une main-d’oeuvre dans les entreprises locales. « Je vois cela comme un projet de société, non seulement de survivre, mais potentiellement de s’épanouir dans les commerces, etc. Ça fait en sorte qu’on se donne plus de chances que les jeunes nés ici reviennent un jour, parce qu’il y a quelque chose. Sinon ça ne serait pas très intéressant. Accueillir des étudiants internationaux ce n’est pas pour faire du fric, ni pour embêter les gens, mais bien parce que c’est la seule façon de garder nos communautés non seulement ouvertes, mais de les développer aussi. »
En conclusion, malgré le fait que la limite d’émission de permis d’études a été diminuée, la situation est moins désastreuse à l’UdeH qu’ailleurs. Les communautés que l’institution dessert seront plus touchées par l’autre décision du ministère de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté. En effet, la diminution des heures de travail permises hors campus crée des maux de tête à beaucoup d’employeurs depuis lundi.
Photo : Jessica Dionne-Hébert